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Par Frédéric VUILLOD,
Fondateur de MEDIATICO
(www.mediatico.fr)

Un pavé dans la marre. En confiant cette semaine à l’Inspection Générale des Finances une mission pour « supprimer les retraites chapeaux », le ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, a pris assurément le risque des éclaboussures. Veut-il souligner les insuffisances du code de bonne conduite Afep-Medef, dont les recommandations ne sont appliquées que par des entreprises volontaires ? Ou donner des gages à l’aile gauche du PS ?

Certes, la retraite chapeau de 831.000 euros annuels de Gérard Mestrallet, PDG de GDF Suez, a fait grand bruit. Et avant elle, celles de Didier Lombard, alors chez France Télécom, ou de Philippe Varin, lorsqu’il était chez PSA. Polémiques. Grands titres de presse. Émoi populaire. Le sentiment de bonus immérités, d’injustice sociale, d’inégalités face à la retraite, révèle une fracture profonde dans notre société. Les politiques ne peuvent y rester sourds.

Pourtant, l’entreprise privée ne saurait se laisser dicter sa conduite. Elle est souveraine dans ses décisions. C’est l’un des fondements de notre droit, comme du capitalisme. En outre, les retraites chapeaux sont un élément de rémunération, donc de motivation, de nos grands patrons, rappelle le Medef, redoutant l’hémorragie de nos talents vers l’international. Mais l’argument sera vite retourné : le talent reste à prouver. Et, avec lui, les bons résultats de l’entreprise et la qualité de vie au travail des salariés, sur qui repose la création de valeur.

Nulle issue à ce débat stérile, sauf à parler in fine de « bonne gouvernance ». L’entreprise d’aujourd’hui se présente comme « responsable ». Elle invoque sa capacité à agir en vertu d’une éthique, que le patron de l’entreprise incarne avant tout autre, dans l’objectif d’assurer le développement équilibré des affaires sur le long terme. Un objectif ambitieux qui repose sur trois éléments clés : la cohésion interne à l’entreprise, le partage consensuel des fruits de la croissance , la cohérence des objectifs de performance avec la rémunération du PDG. Les retraites chapeaux semblent aller à l’inverse de ces trois éléments.

Faut-il opposer l’éthique et les retraites chapeaux ? Trop simple. Faut-il imposer à l’entreprise sa bonne conduite par la loi ? Trop épineux. C’est tout le paradoxe : pourvus d’une dose d’éthique certaine qu’il serait fâcheux de leur contester d’emblée, les dirigeants des grandes entreprises n’en sont pas moins hommes, exposés à de très humaines dérives que la loi pourrait utilement encadrer. Mais Emmanuel Macron l’affirmait cette semaine : « Aucune loi ne remplacera l’éthique des dirigeants ». La mission de l’Inspection Générale des Finances est peut-être terminée, avant même d’avoir commencé.

Frédéric VUILLOD, pour MEDIATICO.

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