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Bonjour Davos. Sur la photo, nos grands dirigeants ont le sourire, eux au moins. Depuis hier, pas moins de 50 chefs d’État et de gouvernement, ainsi que 3.000 décideurs politiques, économiques ou de la société civile, se retrouvent en effet dans la petite station de ski suisse de Davos, à l’occasion du retour post-pandémique du fameux Forum économique mondial.

Thème du Davos 2023 : « Coopérer dans un monde fragmenté ». Coopérer, c’est à voir. Car chez les tenants du libéralisme qui se retrouvent sur place, la compétition n’est jamais loin. Mais de fragmentation, il en est bien question. Guerre en Ukraine, crise énergétique, inflation, menace de récession, hausses de taux, effet sur l’emploi… Les risques sont partout.

Une « polycrise », résume Ofxam, profitant du forum de Davos pour publier son nouveau rapport annuel sur les inégalités mondiales. L’ONG y estime sans détour que « chaque milliardaire représente un échec de politique publique » et préconise une hausse de 75% des impôts sur les plus grosse fortunes, afin de réduire les inégalités croissantes. Pour Oxfam, la polycrise est béante, sous nos yeux, mondiale et avant tout sociale.

En France aussi, la « polycrise » est ancrée dans le social. La mobilisation sur les retraites et les grèves à venir en sont l’incarnation, qui soulignent une fois de plus les inégalités de revenus, le manque d’équité, le coût de la vie, la crainte de l’avenir, mais aussi le refus d’opposer entre elles les générations ou les formes de pénibilité du travail. Pour peu qu’elle attende une réforme, au moins la France attend d’elle qu’elle soit équitable.

Une « polycrise » sociale, écologique, économique

Mais la « polycrise » est aussi écologique. A Davos, revoilà donc Greta Thunberg, 21 ans (Suède), bien décidée à gâcher la fête du Forum économique mondial avec ses amies Vanessa (Ouganda), Helena (Équateur) et Luisa (Allemagne). Elles ont lancé dimanche une pétition sur Avaaz, déjà proche des 700.000 signatures, contre les PDG des énergies fossiles et les décideurs « hypocrites » qui les cautionnent.

« Ils trompent le grand public sur l’impact des énergies fossiles… tout en continuant d’engranger des milliards. Et pourtant, sous nos yeux, la forêt brûle, les inondations et les sécheresses tuent », rappellent-elles, les menaçant désormais de procédures en justice. Fin novembre, 600 jeunes Suédois ont porté plainte contre leur gouvernement pour inaction climatique. Tout comme l’avait fait « L’Affaire du Siècle » en France. Sacrée « polycrise » !

L’expression « polycrise » a été popularisée par l’historien Adam Tooze, professeur à l’université américaine de Columbia, nous apprennent Les Echos. « Dans la polycrise, expliquait-il à l’automne dernier, les chocs sont disparates, mais ils interagissent de sorte que la totalité est encore plus écrasante que la somme des parties ». Conséquence, une multiplication des facteurs de risque, une inquiétude grandissante chez les décideurs, une montée du pessimisme ambiant et, in fine, un repli sur soi généralisé. Le monde est bloqué.

La « polycrise » étant aussi économique, rien d’étonnant à voir les entreprises faire le dos rond. De quoi sera fait demain ? Peut-on investir ou faut-il être prudent ? Ma facture énergétique va-t-elle exploser ? Vais-je devoir licencier ? Officiellement, pas d’alarmisme. La Banque de France se veut sereine et l’INSEE prévoit dans sa dernière note de conjoncture « une reprise de la croissance à partir du 1e trimestre 2023 (+0,1 %) ». Ah, super… !? Autant dire proche de zéro. Et seulement dans deux mois et demi. D’ici là, beaucoup d’eau va couler sous les ponts.

(Photo : World Economic Forum/Manuel Lopez)


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