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3 questions à Philippe X, 
Cadre dans la finance, membre d’Extinction Rebellion

Avec Extinction Rebellion, vous avez participé samedi au blocage du centre commercial Italie2, à Paris : comment se passe une opération ?

On ne connaît jamais à l’avance le lieu de l’action. Les membres d’Extinction Rebellion discutent d’abord sur la boucle de messagerie chiffrée Signal. Un référent nous donne un rendez-vous pour nous expliquer l’action à mener. Le groupe se forme lors du briefing. Nous sommes en général 10 à 15 personnes. Le jour dit, nous suivons le référent dans les transports en commun. Nous ne découvrons le lieu qu’à notre arrivée. 

Il y a plusieurs rôles dans le groupe : les Bloqueurs, les Peace Keepers… A Italie2, j’étais Peace Keeper. Notre rôle est de faire tomber la pression, de s’occuper des gens, d’expliquer notre action au public et aux salariés des magasins bloqués. Les bloqueurs, eux, ferment les accès, baissent les rideaux de fer. Et on rassure les vigiles : il n’y aura pas de dégradations. Nous menons toujours des blocages non-violents en actes, en matériels, en slogans. Même quand on se fait agresser par les forces de l’ordre, comme au pont du Sully, le 28 juin dernier…

Quel symbole le centre commercial Italie2 représente-t-il pour vous ?

Comme tous les grands centres commerciaux, Italie2 représente la croissance effrénée. Nous ne sommes pas contre la consommation, mais contre la « surconsommation », qui n’est pas compatible avec une planète aux ressources limitées. Consommer, c’est acheter utile. Surconsommer, c’est acheter toujours plus, c’est changer de téléphone tous les ans, c’est faire des stocks de vêtements pendant les soldes… alors que le textile pollue énormément. 

Je n’avais jamais manifesté de ma vie. Depuis un an, je m’engage sur ces actions de désobéissance civile car on a ouvert les yeux. On sort de notre déni, on voit que ça va très mal. Nous ne sommes pas tous des anticapitalistes, mais le système du « plus, plus, plus » n’est pas du tout compatible avec une planète aux ressources finies. La biodiversité, la plastification des océans, le réchauffement climatique… On ne peut pas continuer avec un logiciel fondé sur la croissance permanente et la recherche du profit. Nous consommons chaque année l’équivalent de deux planètes, ça ne peut pas continuer.

Pour Extinction Rebellion, cette semaine est celle de la « Rébellion internationale » : que va-t-il se passer ?

Durant dix jours, nous allons mener des actions dans une cinquantaine de villes : New York, Berlin, Sydney, Londres, Amsterdam… Et plusieurs grandes actions à Paris, sous le nom « Rio Grande ». Nous allons faire des blocages, mais aussi des ateliers de sensibilisation sur le plastique ou le vélo, des conférences, des opérations de végétalisation, des moments d’échange et de convivialité, pour alerter l’opinion publique et être toujours plus nombreux.

Notre objectif, c’est que l’État décrète l’urgence écologique. Nous avons des ressources, nous avons de l’argent. Dans mon entreprise, je me suis rapproché de la direction RSE : nous sommes à des années-lumière de l’urgence. Tous les efforts doivent être orientés vers la sortie des énergies fossiles, même si c’est compliqué. Toutes les décisions doivent être prises au regard de notre impact carbone et de notre impact sur la biodiversité. Mais il ne suffit plus de faire son compost soi-même. Aujourd’hui, l’État doit imposer l’urgence écologique pour en faire un objectif collectif. J’ai 50 ans. Il en va de l’avenir de nos enfants.

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