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Hey, Mediatico affiche complet ! Oui, notre évènement sur les tiers-lieux mercredi soir est plein à craquer, et on est super fiers. Ça se bouscule au portillon, ça tente le coup de la séduction, ça essaie même parfois de resquiller… Mais rien à faire. Gestes barrières obligent, 50 places disponibles et 271 personnes sur liste d’attente, cela fera forcément 271 déçus. Rassurez-vous, tout est filmé : pour partie en Facebook live dès mercredi soir, pour l’autre partie dans quinze jours en vidéo sur Mediatico.fr. Aaahhh… vous en avez soupé des vidéos sur Internet, hein ? Pas étonnant. Du coup, se rendre à un événement physique aujourd’hui est un luxe particulièrement prisé. Vous viendrez donc en nombre, dans l’ordre des premiers inscrits. Pour Mediatico ? Peut-être. Pour les Grands Voisins ? Sans doute. Pour les tiers-lieux ? Assurément !

Car au moment où les Grands Voisins s’apprêtent à fermer définitivement leurs portes fin septembre, tournant une page exceptionnelle de l’histoire de l’économie sociale et solidaire en plein cœur de Paris – et de l’histoire de Mediatico qui y aura passé quatre ans – nombre de nouveaux tiers-lieux prennent vie en France, parfois inspirés de l’expérience parisienne, mais le plus souvent attachés aux particularités propres à leur territoire. Ils se situent à la ville comme à la campagne, dans les quartiers populaires ou dans des zones d’emploi, ils sont de petite ou de grande taille et leurs modèles économiques sont toujours différents. Espaces de coworking, fablabs, makerspaces, repair’cafés, garages solidaires, fabriques de recherche, campus connectés, friches culturelles, cafés associatifs, espaces d’innovation sociale, Oasis du mouvement Colibris… La France compterait aujourd’hui près de 2.000 tiers-lieux, actifs ou en projet.

Mais que nous dit cet appétit pour les tiers-lieux sur notre modèle de société ? D’abord, qu’il est urgent de réinventer le travail. Dès 1989, le sociologue américain Ray Oldenburg désignait « The Third Place » comme un espace de socialisation essentiel à l’être humain, à mi-chemin entre la maison et le travail. Les cafés et les pubs remplissent également ce rôle, mais les tiers-lieux s’en distinguent par leur fonction de « faire ensemble ». Rapidement, l’expression « tiers-lieux » va donc désigner des espaces de travail partagés et collaboratifs, où la créativité peut naître entre ses occupants. L’essor du numérique, des imprimantes 3D et du télétravail vont encore conforter cette définition. Jusqu’à l’ère du Covid, où il est juste inutile de vouloir contrer cette vision : qui ne veut pas aujourd’hui réinventer sa relation au travail, s’échapper des exigences de productivité, ou trouver une utilité sociale au boulot ?

Même le gouvernement en a fait un cheval de bataille. Avec un programme interministériel « Nouveaux Lieux, Nouveaux Liens » dévoilé voilà quinze mois, doté de 45 millions d’euros pour développer en France 300 « Fabriques de Territoires » d’ici à 2022, fortement axées sur le numérique et dont la moitié seront implantées en quartiers prioritaires de la politique de la Ville  (postulez pour la prochaine vague ici). Le message est donc passé. En 2018, le rapport sur le coworking remis par la Fondation Travailler Autrement au secrétaire d’État Julien Denormandie affirmait déjà : « Les tiers-lieux portent des dynamiques économiques et sociales et ils s’avèrent certainement plus structurants pour leur territoire d’implantation, et pour l’ensemble du territoire français, que nous l’avions imaginé ».

Pour autant, certains tiers-lieux revendiquent une identité différente, non liée au travail, se voulant davantage tournés vers le champ culturel, vers l’enjeu du social ou vers l’innovation urbanistique. Réinventer la ville, réinventer les rapports humains, réinventer la création artistique valent tout autant, sinon plus, que réinventer le travail. La Ville de Paris a signé une charte l’an dernier avec une quinzaine de partenaires publics et privés pour encourager les projets d’occupation temporaire en s’inspirant du modèle développé aux Grands Voisins : les tiers-lieux ont gagné là leur légitimité. Ils deviennent des acteurs structurants de la vie économique et sociale. Ils créent du lien, ils s’engagent pour des valeurs, ils réinventent les dynamiques de territoires. Au fil des ans, ils sont devenus des instruments essentiels de la transition écologique, sociale, culturelle et démocratique, à laquelle aspirent les citoyens.

Alors à l’heure de la relance, de la relocalisation, de la réindustrialisation, une question se pose : quelle âme voulons-nous donner aux tiers-lieux ? La réponse est rarement dans la poche des financeurs. Elle est toujours dans l’esprit de ses acteurs.

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